✒ La recommandation 5★ de Client Amazon : « La Tribu Libre » sur La Tribu Libre

La recommandation 5★ de Client Amazon : « La Tribu Libre »
tome 2 - La Tribu Libre

La saga d'Aila  fantasy


fantasy

Note : 4.6 / 5 avec 283  critiques

La recommandation 5★ de Client Amazon :

« La Tribu Libre »

Ce récit en Pays hagan a su réveiller en moi les tambours du rythme des esprits de la Terre et me faire vibrer en résonance avec eux. Attention lecteurs, si vous plongez dans ce deuxième volet de la prodigieuse saga d'Aila, préparez vous à en ressortir transfiguré. De par les rites chamans et les traditions haganes, ce tome m'a offert un plaisir véritable, se laissant dévorer en quelques jours seulement tellement je ne pouvais m'en détacher ! Merci encore Catherine Boullery, pour ces aventures toujours plus exaltantes !
(Source : )

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La Tribu Libre
de

aux Éditions UPblisher
Paru le
Environ 540 pages
Prix : 5,99  en toujours disponible
  → ISBN : 978-2-7599-0097-8 en

 
et aussi :
✯ Éditeur : UPblisher
  → ISBN : 978-2-7599-0096-1 en

✯ Éditeur : UPblisher
  → ISBN : 978-2-7599-0098-5 pour

✯ Distributeur : Amazon
  → ISBN : 978-2-7599-0317-7 en pour ceux qui aiment (14,99  €)

✯ Diffuseur : Amazon
  → ASIN : B01GERN03G pour

✯ Diffuseur : Bookeen
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Extrait gratuit d'un des livres de la saga d'Aila offert par Catherine Boullery, auteure de fantasy (autres passages sur Amazon). Excellente lecture ;)

— Sire Hubert ! Ne racontez pas n’importe quoi !
— Vous voyez, vous recommencez ! Vous ne savez pas vous taire !
— Et vous ne savez pas écouter ! Alors, faites un effort et entendez-moi ! J’admets que je ne dois pas être facile à vivre si vous cherchez un chien bien dressé à vos côtés. Pour être franche, je ne le deviendrai pas, mais de là à gagner plus d’importance auprès de votre père que vous, vous faites fausse route sur toute la ligne ! Il a une immense confiance en vous. À qui a-t-il confié le gouvernement de son pays quand il était mal ? À vous !
— Il n’avait pas le choix, de toute façon !
— À croire que je connais mieux la loi que vous ! Bien sûr que si ! Il aurait pu le donner en régence à sire Hector… Et c’est vous qu’il a choisi ! Qu’est-ce que j’apporte moi, avec mon sale caractère ? Une vision nouvelle qui bouscule la routine dans laquelle vous vous êtes installés. Je pose les questions qui dérangent, je dis les mots qu’il ne faut pas, je vous oblige simplement à sortir de vos ornières ! Votre père l’a accepté, mais pas vous ! Vous vous y refusez parce que je bouleverse votre petit monde ! Mais, que vous le vouliez ou non, tout change… Et vous ne pourrez pas l’en empêcher ! Alors, au lieu de freiner des deux pieds, essayez de comprendre et de vous adapter…
— C’est pour vous que vous dites cela ? rétorqua-t-il.
Aila sourit.
— Consciemment non, mais inconsciemment, peut-être ! Il faut que nous arrivions à surmonter ce qui nous sépare et que vous cessiez aussi de douter de vous en permanence ! Personne ne peut prendre votre place dans le cœur des gens, ils en ont assez pour accueillir d’autres personnes. Vous savez, votre attitude porte un nom : la jalousie.
— Vous êtes dure.
— Je suis honnête. Et vous, sire Hubert, vous vous devez de l’être envers vous-même. Quels efforts êtes-vous prêt à consentir ? Je vous rappelle que votre père, même si je dois le laisser en dehors de nos querelles, a été on ne peut plus clair à ce sujet, dit-elle, en rendant sa voix plus grave pour imiter celle du roi.
Il afficha un timide sourire.
— Vous ne me faites pas vraiment confiance, n’est-ce pas ? questionna-t-il.
— Vous m’avez déjà sauvé la vie. Croyez-vous que je puisse l’oublier ? Vous êtes un homme courageux, fiable, mais je ne sais pas si je peux tenir mon rôle à vos côtés. Vous avez tellement peur que je vous prenne votre place ou l’amour de votre père que vous m’enlevez toute chance de vous prouver que je ne veux rien vous voler et ceci m’insupporte. Vous ne me changerez pas et, même si vous pensez que c’est bien dommage, c’est ainsi. Je reste une potiche qui ne plie pas !
— Vous connaissez beaucoup de potiches pliables ?
— Non, mais ce n’est pas grave ! conclut-elle en éclatant de rire.
— Bon, j’ai compris la leçon. Enfin, je crois. Père sera content quand il va retrouver deux monstres transformés en anges…
— Sire Hubert, vous vous êtes déjà engagé une fois pour vous défiler dès que vous en avez eu l’occasion. Je ne le supporterai plus…
— Je le regrette sincèrement, Aila, coupa Hubert. Je sais que je n’ai pas agi comme j’aurais dû. Le pire de tout est que vous aviez raison sur les Hagans. En dédaignant vos conseils, par fierté ou par bêtise, j’aurais pu commettre une grave erreur et je l’ai réalisé… Je vous fais une proposition pour que nous repartions sur de nouvelles bases, je vous offre un serment comme celui que vous avez pris envers notre famille.
Elle pencha la tête sur le côté, attentive.
— Je vous écoute.
— Moi, Hubert d’Avotour, m’engage à considérer Aila Grand comme une partenaire compétente, digne de respect et d’écoute. Je m’engage aussi à ne plus trahir sa confiance.
— J’apprécie ce début encourageant. Cependant, sire Hubert, j’attends encore davantage, j’ai besoin que vous m’accordiez une confiance absolue. Et pour que vous compreniez pourquoi, je dois partager un secret.
Elle chercha comment présenter ce qu’elle avait à partager.
— Nous partons en mission pour tuer le chef hagan. Seulement, si je vous dis sur place que nous ne devons pas l’exécuter, vous devrez me croire parce que je sais des choses que vous ignorez.
Dans les prunelles d’Hubert, elle reconnut la petite lueur qui signalait qu’elle l’agaçait. Ressentant une pointe de découragement, elle poursuivit malgré tout :
— Sire Hubert, depuis Escarfe, je partage la magie des fées, lui confia-t-elle, guettant sa réaction.
Elle en avait prévu beaucoup, de la plus plausible à la plus excentrique, mais pas celle qui suivit. Il éclata de rire.
— Voyons, les fées n’existent pas ! s’exclama-t-il, quand il reprit enfin son souffle.
— Mais vous avez déclaré le contraire à Antan ! répliqua-t-elle, carrément indignée.
— Je ne pouvais quand même pas contredire Orian !
— Alors, je vais vous prouver que je dis la vérité. Regardez !
D’un geste mental, elle projeta les trois épées, suspendues sur le mur droit, directement dans la porte du bureau. Elles s’y fichèrent fermement dans un bruit mat, tandis qu’Aila bénissait les fées de lui avoir donné le petit coup de pouce dont elle avait besoin. Si elles l’avaient laissée tomber à ce moment-là, elle était fichue. Interdit, le prince, immobile et bouche bée, regardait les lames qui vibraient encore.
Ce fut le moment que choisit le roi pour revenir et sa voix retentit :
— Ne me dites pas que vous en êtes venus à régler vos comptes à l’épée ?
— Non, je suis désolée, sire, c’est de ma faute. Je vais réparer votre porte immédiatement et ranger les armes, précisa Aila, avec empressement.
Elle se précipita pour enlever les lames qui avaient transpercé le panneau et grimaça en constatant à quel point elle avait effectivement abîmé le bois…
— Laissez tomber les épées ! Pourriez-vous m’expliquer quelle démonstration nécessitait de détériorer ma porte ?
— Père, Aila voulait juste me prouver qu’elle partageait le pouvoir des fées et elle a parfaitement réussi.
Le visage de Sérain se détendit tandis qu’il observait la jeune fille avec attention.
— Aila, vous avez enfin trouvé d’où vous viennent tous vos nouveaux talents ?
— Oui, mon roi.
— Bien ! Je veux tout savoir. Je vous écoute.
— Je rencontre les fées depuis la fin du séjour à Escarfe. Elles partagent avec moi leur pouvoir, mais je ne les détiens pas et, sans elles, je ne peux rien. Si je l’ignorais, c’était que, pour me préserver, elles effaçaient ma mémoire après chaque visite.
— Est-ce tout ?
— Non, malheureusement. Sire, elles meurent jour après jour et, aujourd’hui, elles n’ont plus la force d’assister les hommes. Si elles partagent leur magie avec moi, c’est parce que je suis la seule à être en mesure de communiquer avec elles et espèrent ainsi que je les aiderai à trouver et à protéger l’héritière, l’être humain qui recueillera tous leurs pouvoirs.
— Et quel rôle joue cette Amata dans toute cette histoire ?
— Il faut croire que je suis sollicitée de multiples parts, car elles ne sont pas à l’origine des visions, ce sont les Oracles. Je suppose que l’un d’eux a pris contact avec moi à sa façon et qu’il m’impose le sentiment de ce que je dois ou ne dois pas faire. Je ne sais même pas si l’appel que j’ai reçu pour sauver la femme qui accouchait venait de lui…
— Et pour sortir notre pays de sa misère ?
— Peut-être devons-nous attendre la naissance de l’héritière ou, si nous ne voulons pas patienter jusqu’à sa venue comme la solution miracle, réfléchir à ce que nous pourrons trouver pour protéger par nous-mêmes nos récoltes ainsi que la population. Comme, jusqu’à présent, nous étions préservés de tout, nous avons perdu l’habitude de faire face et de réagir de façon adaptée.
— Voilà une idée terriblement intéressante… Réapprendre aux gens comment se comporter devant les catastrophes et survivre dans l’adversité… Mais comment savoir ce qu’il convient de faire ? Exceptées ces dix dernières années, nous avons toujours vécu plutôt protégés de tout. À quelle époque devons-nous remonter pour trouver les réponses ?
— Dans les livres antérieurs à la magie des fées, s’il en existe, ou tout simplement en nous creusant les méninges pour réinventer les solutions. Nous ignorons quand arrivera cette héritière, peut-être allons-nous devoir nous débrouiller tout seuls pendant longtemps…
— Quand Orian sera de retour, peut-être aura-t-il des suggestions à nous apporter ? Pour en revenir à vous, dit le roi, en fixant alternativement Aila et Hubert, j’exige votre projet demain après-midi, dernier délai. Maintenant, entraînement de kenda !
— Vous m’excuserez, je n’en serai pas aujourd’hui, je me suis engagé ailleurs, objecta Hubert.
— Pas de souci, mon fils. Les autres, retrouvons-nous au manège !

Ces heures d’exercices procurèrent un bien fou à Aila qui évacua toute la tension accumulée. Elle avait franchi des étapes importantes en concluant une paix provisoire avec Hubert et en parlant de sa mission auprès des fées. Pourquoi le prince n’était-il pas venu s’entraîner ? Elle ne croyait pas à cette histoire d’engagement. Elle avait deviné la souffrance qu’il ressentait à regarder ses partenaires progresser, alors qu’il végétait. Il ne faisait pas mieux que le roi avec un banal bâton de combat, et encore… Si elle avait pu l’aider… Avant de quitter Avelin, elle lui offrit de commencer les cours de hagan le soir même et il fut enchanté par cette proposition.

Sur le chemin du retour, l’idée de revoir le jardin obscur la traversa. Elle parcourut les couloirs jusqu’à sa porte qu’elle ouvrit. L’endroit paraissait toujours aussi magnifique, même en pleine lumière du jour. Elle ignorait pourquoi il touchait autant son cœur, mais elle s’y sentait bien. Un bruit de respiration derrière un massif attira son attention et, curieuse, elle le contourna pour y découvrir Hubert qui s’entraînait seul au kenda. Il s’escrimait comme un beau diable, sans succès, néanmoins sans renoncer. Comme s’il savait d’avance qu’il n’y arrivait pas…
« Il ne manque pas de courage », pensa-t-elle, tandis qu’elle s’approchait à pas feutrés.
— Sire Hubert ?
Surpris, il se tourna vers elle. Il paraissait gêné.
— Aila ! J’ignorais que vous étiez là.
— Je m’en doute… Sire Hubert, ce que vous faites ne peut pas marcher parce que, comme d’habitude, vous voulez tout maîtriser… Le kenda n’est pas une arme qui fonctionne de cette façon, il se ressent. Vous devez apprendre à vous laisser entraîner par lui. Il vous invite à sauter par-dessus un ravin, n’écoutez que sa voix et bondissez ! Il vous souffle de voler, faites-le ! Tant que vous ne lui ferez pas absolument confiance, tant que vous n’entreprendrez les choses qu’à votre manière sans recevoir la sienne, la fusion entre vous deux ne s’accomplira pas. Vous en souffrirez tous les deux : lui, parce qu’il échouera à vous faire voler et vous, parce que vous ne saurez jamais que vous auriez réussi…
Elle se tut un instant avant de poursuivre :
— En vous regardant, l’idée m’est venue de tenter une technique différente pour débloquer la situation. Voulez-vous l’essayer ?
Mal à l’aise, le prince hocha la tête. Elle se mit debout, les mains tendues vers l’avant, tenant son kenda parallèle au sol.
— Placez-vous comme moi, puis passez vos bras autour de moi de telle façon que nos deux kendas se touchent. J’espère, de cette façon-là, vous entraîner avec moi dans sa danse et, cette fois, c’est moi qui vous guide.
Elle lui sourit. Le prince la contourna et plaqua ses bras contre les siens, leurs armes se rejoignant. Dès leur contact, elle eut l’impression d’être projetée dans les airs par une bourrasque phénoménale sans en comprendre la raison. Pourtant, quand elle rouvrit les yeux, elle n’avait pas bougé de place, les bras d’Hubert l’entouraient toujours. Elle reprit le contrôle de son esprit que le tourbillon avait entraîné et continua :
— Vous allez reproduire chacun de mes gestes comme si vous étiez mon ombre. Accordez-vous à la fois sur votre kenda et sur le mien et laissez-vous emporter.
Elle commença par de légers mouvements, guettant la réaction du prince. Bientôt, elle accentua leur cadence et, tout en restant sur place, amplifia ses actions. Pour l’instant, il arrivait à la suivre, mais elle détectait l’effort considérable que représentait pour lui de n’être que son double…
— Ressens ! lui ordonna-t-elle.
Et elle l’entraîna à sa suite, dans un tourbillon de gestes et de déplacements, sentant sa réticence céder graduellement.
— Perçois ! Agis !
Elle quitta ses bras et se retrouva en face de lui. À chaque attaque qu’elle déclenchait, il parait.
— Encore !
Et elle recommença, augmentant le niveau et l’intensité de chacun de ses enchaînements.
— Attaque !
Et Hubert attaqua tel un lion lâché dans une arène, féroce, sauvage, avec une authentique volonté de vaincre. Loin d’avoir donné toute sa mesure, Aila esquiva sans trop de difficulté, malgré tout très impressionnée par la puissance du prince débarrassé de ses chaînes, un autre combattant qu’elle aurait été balayé…
— Repos ! cria-t-elle.
Ils s’arrêtèrent tous deux, essoufflés.
— C’était magnifique ! Vous êtes prodigieux quand vous libérez votre énergie. À présent, je vous enseigne un enchaînement très complexe et je parie que vous allez le réussir. L’objectif final consiste à immobiliser son adversaire, le kenda sur le cou, ici en particulier, dit-elle en montrant un point sur sa gorge. Si l’intention est de tuer, il suffit, au lieu d’arrêter son geste, de le poursuivre jusqu’à l’étouffement. Sinon, on peut seulement diminuer la capacité à respirer de son ennemi et, ainsi, le garder sous contrôle. Il existe deux variantes possibles : l’une où l’appui se pratique debout et l’autre, allongé. Je vous montre la première. Ressens ! Quand mon kenda me dit « vole ! », je vole !
Et elle s’élança comme toujours avec la légèreté d’un oiseau. Elle fit face à un adversaire invisible, puis, lui tournant le dos, elle lança son arme en l’air, exécuta un prodigieux saut arrière au cours duquel l’oiseau qu’elle était, prenant appui sur ses mains, voltigea par-dessus l’homme imaginaire. Arrivée derrière son dos virtuel, elle rattrapa son kenda et le plaqua sur sa gorge, verrouillé par ses deux avant-bras.
— À présent, avec vous !
Elle se mit en face de lui et répéta le même mouvement. Il se retrouva la gorge doucement comprimée par le bâton d’Aila. Elle lui répéta :
— Mon kenda me dit « vole » et je vole ! À vous, sire Hubert !
Il prit position devant un adversaire imaginaire et échoua, tant sa retenue limitait ses gestes. Il doutait à nouveau, tandis que sa raison reprenait le dessus. Aila arrêta rapidement l’exercice, le sentant encore perdu à cause de son échec.
— Sire Hubert, nous allons réellement combattre, je ne vous ferai aucun cadeau et vous volerez ! Si vous ne luttez pas, je vous jure que je vous écrabouillerai ! En garde ! À l’attaque !
Et elle s’élança : assaut, enchaînement de positions, charge, repli, nouvel engagement, paré et, pas à pas, elle poussait le prince dans ses retranchements. Soudain, pour contenir une attaque encore plus violente que les autres, il lança spontanément son kenda, effectua le saut arrière par-dessus sa partenaire et se retrouva derrière elle, son arme rattrapée et posée sur la gorge d’Aila. Il en relâcha la pression immédiatement et, sans réfléchir, Aila se jeta à son cou en explosant de joie.
— Extraordinaire ! Fantastique ! Maintenant, vous avez dépassé vos deux frères sans aucun problème ! Continuons. La deuxième attaque permet d’achever un homme à terre. Là aussi, il faut voler et s’écraser sur lui en appuyant le bâton sur sa gorge pour l’anéantir, éventuellement. Allongez-vous sur le sol, je vous montre.
Docile, Hubert se retrouva sur l’herbe, attendant sans un mot ce qui allait advenir. Il eut à peine le temps de se poser la question qu’elle atterrissait sur lui, l’accablant de tout son poids, le kenda sur son gosier, lui coupant le souffle.
— Maintenant, à vous ! Volez !
Elle se coucha sur le sol, prenant la place d’Hubert, et se prépara au choc. Elle le vit, largement plus massif qu’elle, décoller. Si les jambes du prince broyèrent les siennes, il n’aplatit pas son buste sur le sien, restant en appui sur ses bras. « A-t-il eu peur de me faire mal ? », pensa-t-elle. Levant ses yeux vers lui, l’intensité du regard qui la fixait surprit Aila. Que dissimulaient ses fenêtres bleues ? Elle y plongea pour découvrir l’homme qui s’y cachait, un être tellement secret qu’il s’enfermait derrière un mur inaccessible aux autres, fuyant la moindre expression de ses sentiments, une personne dont la peur d’exister faisait rimer vie avec souffrance. Puis elle revint vers lui, sentant sa chaleur contre elle, ressentant sa puissance et ce qu’il taisait comme un tourbillon vertigineux, son regard rivé au sien comme un aveu de sa fragilité intérieure. Il se fléchit légèrement sur ses avant-bras, se rapprochant d’elle. De lui, elle ne perçut plus que son souffle sur son visage. Il était si près…
— Désolé, j’ai échoué, lâcha-t-il dans un murmure.
Hubert se releva, ramassa son kenda et disparut sans un mot. Complètement secouée, Aila se redressa, tremblant de tous ses membres, partagée entre l’incompréhension de ce qu’elle venait de vivre et la détresse face à ce qu’elle avait entraperçu. Elle prit sa tête entre ses mains et se mit à pleurer doucement, submergée par un flot d’émotions qu’elle ne contenait plus. Par les fées, que lui arrivait-il ? Qu’y avait-il chez cet homme impossible qui la fragilisait autant ? Pourtant, elle s’était fait des promesses, elle avait affirmé son indifférence et elle mentait, elle se mentait… Elle n’était pas indifférente, mais ce qu’elle ressentait, elle l’ignorait. Peut-être lui rappelait-il trop Barou et que, malgré elle, briser le mur de glace qui la séparait d’Hubert figurait une façon de prouver que même son ancien père pourrait l’aimer…

Peu à peu, Aila se calma, progressivement envahie par la quiétude du jardin. Renoncer, elle devait renoncer. Tous les rêves ne s’exaucent pas et son père ne l’aimerait jamais. Si au moins Hubert pouvait arriver à la supporter sans s’énerver, ce serait un tel progrès ! Elle finit par se lever, saisit son kenda et se résolut à regagner sa chambre pour se changer. Elle entendit un bruit à peine audible comme celui du cliquetis d’un pêne. S’accroupissant, elle prit le temps d’analyser les traces laissées par l’intrus qui venait de s’éclipser. Difficilement perceptibles, ce ne fut qu’un heureux hasard qui lui permit de découvrir son identité. Sentant la colère l’envahir, elle décida d’aller sur-le-champ lui demander des explications. Parvenue devant la porte de sa chambre, elle frappa sans hésiter. Lorsqu’il ouvrit, il comprit au premier coup d’œil qu’elle l’avait démasqué. C’était bien lui qui venait de quitter le jardin obscur… Elle s’écria :
— À croire que c’est de famille ! Vous espionnez toujours les gens ainsi ! Pourtant, vous êtes une des rares personnes que j’aurais imaginée réduite à une telle lâcheté ! s’exclama-t-elle, furieuse.
— Acceptez-vous d’écouter mes explications ou suis-je condamné avant de pouvoir me défendre ? Entrez, avant que tout le couloir ne soit ameuté par vos cris…
Elle obtempéra, se sentant un peu gênée à présent.
— Je passais devant le jardin quand j’ai aperçu Hubert en sortir. Il paraissait tellement ébranlé que j’ai voulu en comprendre la raison. Je suis donc rentré et je vous ai entendue pleurer. Comme je ne souhaitais pas vous abandonner seule dans cette tristesse, je suis resté caché, derrière le buisson, attendant de voir si vous aviez besoin d’un ami ou non. Puis, une fois votre calme revenu, je suis reparti silencieusement. Apparemment, j’ai raté ma sortie discrète. Alors, qu’est-ce qui m’a trahi ?
Elle lui tendit un bouton. Adrien s’en saisit et découvrit l’endroit de sa veste d’où il provenait.
— Pas de chance… Je suis quand même rassuré, je n’avais pas laissé de traces… Aila, je n’ai pas voulu vous espionner, je me sentais juste inquiet pour vous… Vous êtes toujours si forte, si sûre de vous et vous paraissiez si malheureuse…, comprenez-moi…
Adrien se tut. Il semblait sincèrement contrit et elle l’observait, silencieuse. Il reprit :
— Que s’est-il passé entre vous ?
— Rien.
— Ne me dites pas qu’un rien peut vous mettre dans cet état !
— Si, quand ce rien est une absence de tout…
Adrien, pensif, ne sut que répondre, mais se lança tout de même.
— Vous l’aimez ?
— Vous croyez que je pourrais l’aimer ?
— Je l’ignore.
— Moi aussi… J’ignore ce que votre frère m’inspire et il déchaîne des sentiments : la colère, la tristesse, le respect, mais l’amour ? Ma mère a deviné au premier coup d’œil que Barou deviendrait l’homme de sa vie et j’en suis loin.
Tout à coup, elle eut envie de tout lui dire, de se raconter, de lui confier ses doutes, ses peurs, ses désirs. Son regard amical posé sur elle lui donnait la sensation qu’il pourrait tout entendre, tout comprendre… Cependant, n’ayant guère l’habitude de se livrer, elle choisit de se taire.
— M’en voulez-vous toujours ? tenta-t-il.
Elle secoua la tête.
— Alors, dépêchez-vous ! Vous allez être en retard pour le dîner si, comme je le pense, vous ne portez pas la tenue adaptée pour passer à table, conclut-il.

Elle retourna rapidement dans sa chambre où Élina l’attendait. N’ayant plus le temps de se baigner, elle se contenta de changer d’affaires avant de rejoindre la salle à manger. Seuls le roi et Adrien échangèrent des banalités pendant ce repas tristement silencieux. À la fin, Avelin vint demander à Aila l’heure et le lieu pour le cours de hagan. Attiré par leurs propos, Aubin sauta sur l’occasion de participer aux leçons, nullement découragé par les remarques d’Aila sur la difficulté de cette langue. Ils décidèrent de se retrouver dans la chambre d’Aubin immédiatement.

Confortablement installée au pied de la cheminée, elle se partagea entre perfectionnement pour Avelin et apprentissage pour Aubin. Pour amener le jeune prince à progresser en douceur, elle lui suggéra de se substituer à elle et d’enseigner le hagan à Aubin. Cet exercice se révéla très formateur pour lui. Il l’obligea à reprendre ses connaissances depuis le début et à les organiser. Graduellement, Avelin introduisit le vocabulaire de base, les règles de grammaire et de conjugaison à l’aide d’exemples simples, sous l’oreille vigilante d’Aila qui corrigeait la moindre erreur, rectifiant prononciations et tournures de phrase. Au bout d’une demi-cloche de travail intense, les trois amis se quittèrent, promettant de se retrouver le lendemain, même heure, même endroit.

Elle erra un moment dans les couloirs avant de regagner sa chambre, laissant flotter ses pensées. Soudain, la question d’Adrien resurgissait dans son esprit : « Vous l’aimez ? » Non, elle n’aimait pas Hubert, ceci apparaissait subitement comme une évidence. Comment pourrait-elle s’éprendre d’un homme qui la traitait avec autant de désinvolture ? À vrai dire, il la déconcertait, mais être troublée par une personne ne signifiait pas obligatoirement en être amoureuse. Elle sentait en lui un vrai besoin d’être aimé, le même que le sien, avec une fragilité similaire. Elle avait envie de le serrer contre elle pour le protéger des autres et de lui-même. Elle aurait voulu le rassurer et lui apprendre que la vie pouvait être belle. Elle y serait peut-être parvenue, s’ils avaient été différents, s’ils avaient partagé un peu plus, mais ce n’était pas le cas…
Mâchonnant sa graine de Canubre, elle rejoignit son lit, glissa sa main sous l’oreiller, pressentant le sommeil et le moment de retrouver les fées.
— Aila, bienvenue ! s’exclama Amylis qui l’attendait avec un sourire éclatant.
Elles partirent toutes les deux rapidement vers le lac où la jeune fille salua toutes ses amies. Toutes s’enquirent de sa santé et lui proposèrent de partager avec elle le pouvoir de l’eau. Au regard de l’extrême complexité de ce pouvoir, elles ne perdirent pas de temps et commencèrent l’apprentissage immédiatement. La nuit y passa et, à l’heure du premier rayon de soleil, la fée Esprit raccompagna Aila vers la porte entre leurs deux mondes.
— Amylis, j’oubliais ! Pouvez-vous remercier vos sœurs du petit coup de pouce pour les épées ? Si vous ne m’aviez pas secondée, j’aurais eu l’air plus que stupide…
Amylis se mit à rire doucement.
— Pas de souci ! Il y avait urgence, il me semble !
Aila se figea. Jamais encore, elle n’avait vu une fée rire et elle eut l’impression que l’univers entier entrait en vibration et étincelait de mille feux.
— Une dernière question, reprit-elle, est-ce vous qui m’avez appelée pour que j’aille sauver la femme et son bébé ?
— Non, je pensais que tu étais tombée sur eux par hasard. Pourquoi ?
— L’appel de l’homme a résonné dans ma tête, je ne l’ai vraiment entendu que lorsque nous sommes arrivés près de sa maison.
— Une vision, des appels mentaux, tout cela sonne de manière bien étrange et j’en parlerai à mes sœurs. Il serait utile de savoir l’expliquer. En tout cas, nous ferons ce que nous pourrons pour t’aider.
— L’Oracle peut-il en être à l’origine ?
— Pour la vision, c’est certain, mais pour l’appel, ce n’est qu’une possibilité parmi d’autres…
— Bonsoir, Amylis.
— C’est le matin, alors bonne journée, Aila !
Et Amylis rit de nouveau, enchantant la vie autour d’elle et le cœur d’Aila avec…


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